vendredi 25 avril 2014

Matricule 728 et commission d'enquête

Écrit le 21 août 2013

Au sujet de matricule 728 et des accusations qui ne seront pas retenues contre elle. Encore une fois, on s’indigne devant l’évidence de l’injuste : on s’étonne que notre si merveilleux système de justice puisse légaliser les faits et gestes de matricule 728, lors de la manif’ de soir du 20 mai 2012. Et toute cette indignation est sans doute légitime, ou sinon compréhensible.

Mais ce qui est encore plus inquiétant – bien avant cette prévisible farce du système de justice, c’est que celles et ceux qui s’étonnent aujourd’hui de la légalité d’une telle répression seront les mêmes qui demanderont demain, pour une énième fois, une commission d’enquête. Mais que croyez-vous ? Qu’une éventuelle commission d’enquête sur le travail policier sera réellement indépendante de tout le système de justice qui s’élève sans cesse contre nous depuis le printemps ? Ou encore, que le Parti libéral, qui a largement profité de la répression politique et qui reviendra au pouvoir dans la prochaine année, sévira contre le corps policier à la suite d’une improbable commission d’enquête qui aurait fait son boulot ? Dites moi, c’est vraiment à cela que vous croyez ?

Car la malheureuse vérité – celle qui nous dérange et que l’on refuse de voir dans toute sa clarté, c’est que la stratégie légale est dorénavant vouée à l’échec. La vérité, c’est aussi que les rues montréalaises sont désertes depuis les quelques 1400 arrestations qui eurent lieu entre le Sommet de l’éducation et le 1er mai dernier. La vérité, c’est enfin que le mouvement du printemps 2012 est mort et enterré, non seulement sous les coups de la répression, mais aussi à l’intérieur de son refus entêté de s’organiser contre cette répression.

Nous vivons, mes chers et chères, à l’intérieur d’un rêve légaliste. Nous nous obstinons à revendiquer une commission d’enquête. Nous persistons à vivre dans une illusion sociale-démocrate - dans cette illusion qui s’effondre chaque jour sous nos yeux. Bref, nous espérons sauver la « société » contre elle-même. Et si nous continuons à rêver malgré tout, c’est peut-être moins par convictions politiques que par refus de se mettre en jeu – par peur d’affronter le risque politique de l’illégalité.

Pourtant, ce n’est pas devant les tribunaux que nous combattrons P6 (et encore moins, la loi des conservateurs sur les masques). Ce n’est pas non plus par un simple vote pour QS que nous stopperons le rouleau compresseur du néo-libéralisme. Non, autant à travers l’expérience de la grève que sur le territoire politique de la rue, c’est dorénavant dans l’illégalité que nous survivrons. Que nous ne serons pas assimiléEs par le quotidien du travail. Et que d’autres mouvements naitront des cendres du printemps.

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