dimanche 26 janvier 2014

La genèse de l'État moderne et la Laïcité

On ne saurait parler de la Laïcité sans parler d’abord de la genèse de l’État moderne. On ne le saurait, car ce serait oublier les dispositions qui l’ont accueillie, les lignes tracées à même le sol de la société sur lesquelles elle s’est enracinée, pour ensuite fleurir dans les conflits politiques du 19e siècle. Et même pour devenir le parasite réactionnaire qu’elle est devenue dans la politique du 21e siècle.

Sans le monstre de l’État moderne, sans sa grande neutralité fictionnelle, sans le grand partage libéral que ce monstre a opéré entre le privé et le public, entre l’intériorité morale et la citoyenneté publique, entre la subjectivité et l’objectivité, la Laïcité eut en effet été un impensable et même une impossibilité. C’est à travers la métaphysique de l’État moderne, de sa neutralité fictionnelle – comme pouvoir objectif au dessus des Hommes privés - qu’elle s’est révélée l’arme privilégiée du combat moderne contre les religions.

En d’autres mots, et pour le dire sans doute plus simplement, l’État moderne a préexisté à la laïcité et lui a offert une disposition à l’intérieur de laquelle elle a pu naître et prendre ses aises. Et cette préexistence, c’est elle que nous devons critiquer. Non pas au nom de quelconques droits individuels (qui reconduisent encore l’idée d’une neutralité fictionnelle de l’État, d’une neutralité qui protègerait les individus à travers le Droit). Mais au nom d’un anti-étatisme strict, qui ne croît pas aux balivernes de l’État moderne : à sa neutralité, à son espace civique, à sa Justice.

L’État moderne n’a jamais été neutre, et ne le sera jamais : il ne l’a jamais été à travers le Droit, et ne le sera pas davantage à travers Laïcité. Si nous devons nous élever contre la Laïcité, c’est donc contre l’État que nous devons le faire - contre ce même État qui nous tirait dessus (avec ses balles de plastique) lors du printemps 2012, et qui continuera à vouloir nous éliminer dans les années à venir.

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