samedi 2 mai 2015

Les thugs de Baltimore

Écrit le 27 avril sur facebook

Des foyers d’émeutes ici et là, des policiers aguerris tombant au combat, des jeunes les affrontant comme s’il s’agissait d’un jeu enivrant, et même des badauds pillant des commerces à grande surface. Sans doute les pires émeutes aux States depuis les émeutes de LA en 1992. Des émeutes violentes, brutales, incendiaires. La puissance d’État, et sa souveraineté sur une ville entière, s’effondrant tel un château de carte au centre de l’empire.
C’est toute la misère des ghettos qui s'exprime dans ces émeutes. C’est toute la misère des ghettos aux maisons barricadées, des ghettos où les rafales de balles percent le silence de la nuit, où les junkies trainent leurs savates à chaque coin de rue, où la populace oubliée s’entassent dans les taudis. Une prison à ciel ouvert où la police règne avec brutalité. Une misère quotidienne, structurelle, infernale, que les noir-es américain-es partagent, de génération en génération, comme un mal qui trouve son origine la plus lointaine dans l’esclavage.
Et la mairesse de Baltimore, noire par ailleurs, de déclarer : nous allons tout mettre en œuvre pour freiner ces thugs qui saccagent la communauté que nous avons mis des années à bâtir. Et les médias de répéter à l’unisson que ces jeunes forment seulement un amas de criminels. Des thugs, des voyous, des bêtes immondes, rien d’autres. Il faut tout mettre en œuvre pour les freiner : autrement dit jusqu’à leur tirer dessus avec la Garde nationale. Et cela pour sauvegarder la communauté : la communauté en ruine que ces mauvais architectes auraient bâti main dans la main avec les élites à lourde majorité blanche.
Ne vous inquiétez pas : la Garde nationale rétablira l’ordre. Les balles siffleront dans la nuit s'il le faut. Les jeunes thugs, qu’a enfanté la communauté en ruine, tomberont sous les tirs. Et cette répression fondera sa légitimée dans une rhétorique où l’ordre intransigeant écrasera le mal. Mais en abattant ainsi ses propres enfants, la communauté en ruine s'assurera de donner vie à de nouvelles bêtes immondes qui, un jour ou l’autre, reviendront la hanter. Et tel un cercle vicieux, la même histoire recommencera.

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